signes et sens

Projet

La compréhension en lecture : un problème préoccupant

Il existe un réel problème de compréhension en lecture. Pour Alain Bentolila, chercheur français, 20% de la population est illettrée, dans la mesure où elle peut déchiffrer des mots, des phrases courtes, mais se révèle incapable de saisir le sens d'un texte court et simple parlant de choses de la vie courante.
Mais si on envisage la réception de textes plus longs, plus complexes et surtout de textes présentant une grande part d'implicite ou des éléments à valeur symbolique, le nombre de mauvais lecteurs s'accroît considérablement : il est difficile de préciser un chiffre, mais il semblerait que plus de 60% de la population soit en difficulté pour comprendre un texte complexe et nécessitant une certaine part d'interprétation.
Dans des sociétés de l'écrit comme les nôtres, les conséquences de ces difficultés sont graves, pour l'individu et pour la société :

  • Pour l'individu, freiné dans sa recherche de sens, écarté de toutes les informations distanciées présentes dans l'écrit (livres, journaux, Internet.), en échec dans ses études, mais limité aussi dans sa recherche d'emploi ou dans sa volonté de comprendre la société dans laquelle il vit. Enfermé aussi par rapport à son désir de s'exprimer : un mauvais lecteur est toujours en difficulté d'écriture.
  • Pour la société qui, à travers ce problème, perd des travailleurs capables de s'informer, de s'adapter et des citoyens aptes à analyser les enjeux socio-politiques avec lucidité, distance et esprit critique.

Les problèmes d'apprentissage en lecture

Il en est du langage écrit comme du langage oral : le cerveau humain est apte a l'apprendre, mais cette potentialité ne peut être actualisée que grâce à l'interaction entre l'enfant et des éducateurs. La lecture n'est pas innée, elle est le résultat d'un apprentissage guidé.
Dans nos pays, ce guidage est satisfaisant en ce qui concerne l'apprentissage du code : la plupart des enfants apprennent à déchiffrer des textes avant 8 ans. Il est beaucoup moins satisfaisant en ce qui concerne la compréhension de texte, comme en témoignent les enquêtes Pisa. Pourquoi ?

  • La plupart des gens, y compris les enseignants, "présument que la compréhension est un processus automatisé qui advient naturellement dès lors que tous les mots du texte ont été identifiés (il n'est donc pas nécessaire d'apprendre à comprendre, plus exactement apprendre à identifier les mots se confond avec apprendre à comprendre d'où il découle que pour vérifier la compréhension, il suffit de vérifier l'identification correcte des mots)", C. Tauveron - Lire la littérature a l'école, éd. Hatier, 2002, p.13.
  • Cette confusion empêche les éducateurs d'identifier les véritables obstacles à la compréhension en lecture, qu'ils soient liés à la structure des phrases et des paragraphes (problèmes de référence ou de connexion) ou à la structure de textes (problème de hiérarchie des idées dans un essai, de position du narrateur ou d'ellipses dans un roman, par exemple). Il y aurait lieu de s'intéresser à la fois aux obstacles inhérents au texte et à ceux qui découlent de l'attitude cognitive du lecteur.
  • De cette méconnaissance de la lecture en tant qu'acte de compréhension, découlent des pratiques pédagogiques inadéquates : on confond souvent le " faire-lire" avec " l'apprendre à lire". On se contente trop souvent de donner un texte à lire, puis d'évaluer la compréhension du lecteur à travers ses réponses, sans se soucier d'identifier la logique qui a mené à l'erreur. Il s'agit alors d'évaluation et pas d'apprentissage. Ceux qui savent sont récompensés et les autres sont laissés seuls face à leur incompétence. Il n'est pas étonnant dès lors que la lecture, associée à l'échec scolaire et au jugement négatif,  soit une corvée pour tant de gens.
  • Ajoutons à cela que le choix des textes est parfois contestable :
  • Ou bien, estimant les lecteurs peu performants, on les confronte avec des textes insipide, peu signifiants et donc sans intérêt.
  • Ou bien on leur donne à lire des textes plus complexes, sans leur fournir les clés, des textes dans lesquels ils ne peuvent pas se retrouver, notamment des  textes d'une autre époque, écrits dans un langage quasi étranger ou faisant allusion à des situations inconnues. La lecture est bien entendu une formidable occasion de voyager dans le temps et dans l'espace, mais il est indispensable d'être équipé pour franchir ces distances.
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