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Naomi Watts: “Hollywood a failli avoir ma peau”

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Naomi Watts.

Naomi Watts.
© Fred Prouser / Reuters
Interview Christine Haas , Mis à jour le

Dix ans après « Mulholland Drive », l’actrice anglo-australienne est la vedette féminine de « J. Edgar ».

Arrivée en pleine nuit, Naomi Watts s’est installée dans la somptueuse suite d’un palace parisien, en soupirant de bonheur. La vue sur le jardin, le champagne, les fleurs, le soleil qui se lève sur Paris, elle a tout photographié pour ses fils, Sasha, 4 ans, et Samuel, 3 ans, restés à New York avec leur père, l’acteur Liev Schreiber. En dix ans, depuis son apparition fracassante dans « Mulholland Drive » et quelques incarnations très noires, l’actrice anglo-australienne est devenue une star. Le mot la fait rire, car elle n’a rien oublié des humiliations subies durant ses longues années de galère. Coiffée, maquillée et enroulée dans de la soie, elle paraît bien frêle au milieu des coussins. Il ne faut pas s’y fier. La blonde hitchcockienne qui fait fantasmer la planète a la peau dure. Derrière la fragilité, il y a une formidable capacité à chercher de nouveaux défis. A 43 ans, Naomi Watts n’a peur de rien et garde la flamme.

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Paris Match. Tournez-vous moins depuis que vous avez des enfants ?
Naomi Watts. Je suis comme toutes les femmes qui travaillent. J’essaie de faire les deux le mieux possible. Mais s’ils sont malades quand je tourne, cela me déconcentre. Et quand je passe trop de temps loin des plateaux, je deviens distraite. Etre mère est un bonheur, une douleur, un combat et beaucoup de frustration.

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Vous semblez plus équilibrée...
Je suis moins obsessionnelle, je ne passe plus mes nuits à me torturer à propos d’un rôle. Je me donne entièrement pendant le tournage et, en fin de journée, je pars sans me retourner et je vole vers mes enfants. L’essentiel est auprès d’eux. Désormais, le bonheur, pour moi, c’est quand ils sautent sur mon lit le matin, au réveil.

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Même quand c’est Clint Eastwood qui vous sort du lit ?
Là, je n’ai pas pu résister ! Pourtant, “J. Edgar” est essentiellement un film d’hommes. Mais j’étais à fois curieuse de travailler avec Clint Eastwood et fascinée par la personnalité de cette petite bonne femme qui, ayant passé quarante-huit ans aux côtés de J. Edgar Hoover, a tenu la promesse qu’elle lui avait faite de détruire après sa mort tous les dossiers secrets du FBI. C’était également très amusant de vieillir des années 20 aux années 70.

Et dans la réalité, vieillir ne vous inquiète pas ?
J’espère vaincre la malédiction de la quarantaine. J’ai passé le cap des rôles d’objets sexuels, qui ont une durée de vie très limitée, pour arriver aux personnages plus complexes. Les héroïnes que je jouerai seront certainement plus souvent des mères et des femmes divorcées que des jeunes mariées.

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Les personnages que vous incarnez ont-ils un point commun ?
Je suis attirée par les rôles de femmes beaucoup plus fortes que moi. Elles me font du bien. Elles me montrent l’exemple et me tirent vers le haut.

Vous ne vous sentez pas forte ?
Avec le temps, je me suis endurcie. Au début de ma carrière, tout le monde pensait que j’étais aussi vulnérable que les personnages qu’on me faisait jouer. Mais il y a de la férocité en moi. Et j’ai une puissance de résistance qui se révèle face aux épreuves.

Vous vivez à New York. Est-ce parce que vous n’aimez pas Hollywood ?
C’est surtout parce qu’il est plus facile d’y mener une vie de famille normale. Mais c’est vrai que Hollywood a bien failli avoir ma peau. Je ne sais pas si je dois blâmer la ville ou ma propre incapacité à prendre mon destin en main. En arrivant, j’étais très naïve. Au bout de cinq ans à vendre mon âme pour des petits boulots merdiques, j’avais fini par me résigner à l’idée que je ne serais jamais qu’une actrice occasionnelle.

Le parcours de votre compatriote Nicole Kidman devait vous faire terriblement envie !
Nous nous sommes connues à l’âge de 14 ans et elle est montée très haut, très vite. Mais elle s’est toujours comportée comme une grande sœur avec moi. Quand il m’arrivait de ne plus pouvoir payer mon loyer, je me disais qu’il était temps de rentrer en Australie, et elle me retenait : “Tiens bon ! Il ­suffit d’un film.” Elle avait raison. David Lynch a fait exploser la coquille à l’intérieur de laquelle j’étais recroquevillée.

Vous vous souvenez du moment où tout a basculé ?
Je me souviens du soir où “Mulholland Drive” a été ­présenté au Festival de Cannes. J’étais timide, je m’étais ­coiffée toute seule et j’avais l’air d’une pauvre chose à côté de ma partenaire, Laura Harring, qui avait l’allure d’une vamp ­sophistiquée. J’entendais la voix annoncer le nom de mes ­partenaires, mais pas le mien ! J’étais déçue. Mais, le matin ­suivant, c’était de la folie. Je recevais des appels de félicitations de partout, et tout le monde voulait être mon agent.

C’était intimidant ?
Sur le moment, je n’ai pas eu le temps de bien absorber ce qui m’arrivait, car je devais repartir immédiatement en Australie pour terminer un téléfilm. Et là, au milieu de nulle part, un assistant m’apportait des télégrammes, des bouquets de fleurs. C’était surréaliste. Et quand le film est sorti, je n’ai plus eu qu’à me laisser porter.

Et au bout de dix ans, est-ce que vous maîtrisez l’exercice du tapis rouge ?
Pas du tout. J’ai passé toute mon enfance dans l’ombre de mon frère, Ben, et, en vrai garçon manqué, je suis plus à l’aise sur un terrain de foot. J’ai beau faire des kilomètres de tapis rouge, c’est toujours un cauchemar. Je ne sais jamais comment me comporter quand j’entends des voix hurler mon nom. Et je suis paniquée quand je me prends les flashs des appareils photo dans la figure. Rien de tout cela n’est naturel.

Mais le succès, c’est bon pour l’ego, non ?
Oui et non, car le succès vous met dans la lumière avec vos insécurités. Je ne me dis pas : “Ça y est ! je suis arrivée. Cette place est la mienne et je n’en bougerai pas.” Comme tous les acteurs, je suis programmée pour douter. Le doute me nourrit, me stimule, et son intensité ne diminue jamais.

Est-ce qu’il vous arrive de paniquer en plein tournage ?
Bien sûr. Lorsque j’entends “Moteur !” et que je sens tous les regards converger vers moi, si je ne suis pas totalement dans mon personnage, je suis aussi flippée qu’un lapin dans les phares d’une voiture.

Et alors ?
Et alors, quand on a des partenaires comme Sean Penn, Viggo Mortensen ou Leonardo DiCaprio, on est littéralement électrisée et portée par leur énergie.

Vos enfants sont-ils conscients de votre notoriété ?
Pas encore. Sasha, l’aîné, a remarqué que parfois quelqu’un me coiffe, me maquille, et ça le fascine, parce que je ne ­ressem­­ble plus du tout à la maman qu’il voit tous les jours. Et quand nous sommes suivis par des paparazzis, s’il sent que je suis tendue, il me dit : “Ne t’inquiète pas, maman. Laisse-les prendre une photo et ils partiront.” Il a le chic pour me rassurer.

Votre mari, Liev Schreiber, est également comédien. C’est compliqué à vivre, au quotidien ?
Au contraire, c’est réconfortant de savoir qu’il comprend mes frustrations et mes angoisses. Avant de le rencontrer, je connaissais déjà son travail et j’étais très impressionnée par son talent. Je suis extrêmement fière de lui.

Envisagez-vous de travailler ensemble ?
Nous avons tourné deux films ensemble. Mais il fait beaucoup de théâtre et m’encourage à monter sur scène. Je sais que cela me rendrait heureuse, mais j’ai encore trop peur et pas assez confiance en moi. Ce sera mon prochain grand défi.

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