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Recommandations pour la prise en charge de douleurs thoraciques aiguës

  

Rapport du Groupe Interdisciplinaire Belge
de Cardiologie Aiguë

BIWAC: Belgian Interdisciplinary Working Group
on Acute Cardiology 

  

Claeys MJ , Vandekerckhove Y, Bossaert L, Calle P, Martens P,
Hollanders G, Vrints C, Van de Werf F, Renard M, De Raedt H,
De Meester A, De Smedt J

Table des matières:

Introduction

PHASE PRE-HOSPITALIERE (cliquez ici pour l'arbre décisionnel )
  Reconnaissance et stratification du risque
  Que doit faire le patient lorsqu’il constate ces symptômes d’alerte ?
  Quels premiers soins faut-il faire au chevet du patient suspect d’IDM ?
 
Que faire avec des patients non suspects d’IDM (« patient à faible risque ») ?

PHASE HOSPITALIERE PRECOCE (cliquez ici pour l'arbre décisionnel )
  Règles générales
  IDM avec persistance de segments ST sus-décalé
  Syndrome coronaire aigu sans persistance de segments ST sus-décalés
  Patients avec douleur thoracique sans origine évidente

CONCLUSION

REFERENCES

Introduction

Les affections cardiaques d’origine ischémique sont responsables d’un taux élevé de morbidité et de mortalité dans les pays occidentaux. L’infarctus aigu du myocarde (IDM) y prend une part importante.

La douleur thoracique est le symptôme principal des différentes formes d’atteintes cardiaques d’origine ischémique, telles l’angor stable, l’angor instable, l’IDM, mais aussi d’atteintes non-cardiaques et non vitales comme la pleurite ou l’œsophagite. Le pronostic de toutes ces affections est très différent ; il est considéré comme mauvais pour l’IDM. En effet, Les résultats de l’étude WHO-MONICA nous apprennent que la mortalité à 28 jours d’un IDM est encore toujours de 40 à 50%. Les 2/3 des décès surviennent dans la phase pré-hospitalière, suite à un arrêt cardiaque par arythmie ventriculaire (fibrillation ventriculaire (FV). Le dernier tiers des décès est généralement secondaire à la décompensation cardiaque, faisant suite à la perte myocardique importante. Une amélioration du pronostic peut être attendue par la mise en œuvre d’une stratégie thérapeutique axée sur un diagnostic précoce de l’IDM, un traitement de la FV, ainsi qu’une revascularisation coronaire rapide.

A ce stade, il est indispensable que tous les acteurs concernés par le traitement de l’IDM se concertent bien. Les différents éléments de la chaîne sont le patient (et son entourage), le médecin de famille, la centrale d’appel « 100 », les ambulanciers, le véhicule d’intervention mobile (VIM), ainsi que les médecins et infirmières de l’hôpital qui vont prendre en charge le malade.

Des recommandations de prise en charge de la douleur thoracique aiguë sont proposés par un groupe interdisciplinaire de cardiologie aiguë, comprenant des cardiologues, des urgentistes, des intensivistes et des médecins traitants, afin de permettre un traitement intégré et uniforme de patients souffrant d’une douleur thoracique potentiellement fatale. Les arbres décisionnels sont basés sur des directives internationales pour le suivi des syndromes coronaires aigus. En outre, une stratification simple du risque cardio-vasculaire est incluse au schéma de traitement pour la mise en œuvre la plus efficace possible des premiers soins en Belgique

PHASE PRE-HOSPITALIERE (cliquez ici pour l'arbre décisionnel )

Reconnaissance et stratification du risque

Le premier et vraisemblablement le plus faible chaînon dans la conduite des soins optimaux est la reconnaissance des symptômes d’alerte par le patient lui-même. La douleur thoracique est rarement ou tardivement considérée comme une atteinte cardiaque sous-jacente.

Une douleur thoracique continue (>20 min) ou bien une série de courtes douleurs répétitives doivent être un signal d’alarme et doivent pousser le patient à entrer le plus tôt possible en contact avec un service d’aide médicale. Un retard dans ce diagnostic augmente sensiblement le risque de mortalité cardiaque. Le délai entre le début de la douleur et le contact avec le service d’aide prend toujours en moyenne deux heures. Ici intervient de manière capitale le rôle des médecins généralistes et spécialistes concernés afin de sensibiliser, par des campagnes d’information, la population et surtout les personnes qui présentent un risque important d’IDM. Il est nécessaire également d’informer les patients avec cardiopathie connue sur les symptômes de syndrome coronaire aigu (par exemple des plaintes thoraciques qui surviennent au repos ou au moindre effort).

Lorsque la douleur thoracique survient une seule fois et est de courte durée (< 20 min), elle n’est vraisemblablement pas à considérer comme le symptôme d’une affection à haut risque et peut donner lieu à une recommandation de consultation médicale élective (non urgente).

Que doit faire le patient lorsqu’il constate ces symptômes d’alerte ?

Le patient doit contacter au plus vite son médecin traitant, ou alors la centrale d’appel « 100 ».

Lorsque le médecin traitant est appelé, ce dernier doit se faire une idée personnelle par téléphone de la sévérité des douleurs (stratification du risque). S’il s’agit d’un patient connu pour une pathologie cardiaque ou bien lors de symptômes associés (par exemple dyspnée, vertiges, nausées, transpiration), la douleur thoracique doit être considérée comme le signal d’alerte d’un syndrome ischémique aigu et nécessite un contact de transport médicalisé par le VIM via l’appel « 100 ». Dans ce cas, il est indispensable que le médecin traitant contacte au préalable la centrale d’appel « 100 » avant d’aller voir lui-même ce patient. Ceci va permettre de raccourcir le délai entre le début des plaintes du patient à haut risque et la disponibilité de l’intervention de l’équipe médicale. Si le médecin traitant considère, par téléphone, qu’il ne s’agit pas d’un symptôme vital, alors il peut s’en rendre compte par lui-même sur place ou bien, il peut faire appel à une ambulance conventionnelle.

Si le patient appelle lui-même le centre d’aide « 100 », idéalement, la stratification du risque médical devrait se faire par téléphone. Dans la pratique, ceci n’est guère possible parce que la centrale d’appel « 100 » ne possède pas le personnel qualifié au niveau médical. En outre, des études scientifiques ont montré qu’il était très difficile de pouvoir donner un avis de risque d’IDM uniquement sur base d’un entretien téléphonique. La décision quant à l’envoi d’un VIM ou d’une ambulance « 100 » conventionnelle n’est souvent pas optimale. Actuellement, la centrale d’appel « 100 » ne prend en considération que le critère d’âge pour lequel une intervention médicale peut être proposée ; ce qui inclus les patients de plus de 40 ans qui souffrent de douleur thoracique.

La stratification du risque peut être alors réalisée par le médecin traitant et/ou par le personnel de l’ambulance. Dans chaque cas où il existe une forte suspicion d’IDM, une équipe médicale urgente doit être au plus vite contactée.

Quels premiers soins faut-il faire au chevet du patient suspect d’IDM ?

Le but principal du premier secours est de reconnaître et de traiter les arythmies potentiellement létales (par exemple une FV).

En première ligne, une évaluation minimale des paramètres vitaux (tension artérielle et pouls) est nécessaire. Ensuite un monitoring ECG, lié à un appareil de défibrillation, doit être raccordé en présence d’infirmières ou de personnel médical aussi vite que possible. Il faudrait que toutes les ambulances en charge de patients souffrant de douleur thoracique soient équipées de défibrillateur et d’un personnel formé à son fonctionnement adéquat (défibrillateur automatique externe). Une défibrillation précoce par l’ambulancier ou le secouriste présents sur place peut sauver une vie.

Ensuite, une voie intraveineuse doit être placée afin d’infuser rapidement les médicaments utiles en cas d’arrêt cardiaque soudain. L’enregistrement d’un ECG 12-dérivations peut permettre le diagnostic d’IDM et, dès ce moment, un contact téléphonique doit avertir l’hôpital de certaines mesures à prendre (préparer une thrombolyse ou avertir les cardiologues interventionnels pour une PTCA primaire).

L’enregistrement de cet électrocardiogramme à cette phase aiguë est utile si un médecin expérimenté en interprétation ECG est présent. Dans le cas contraire, il ne faut pas retarder significativement le transport du malade vers l’hôpital.

Le second but du premier secours est de diminuer l’ischémie et la nécrose myocardique, ainsi que de prévoir un transport rapide et sûr vers un hôpital avec unité de surveillance cardiologique afin de proposer une thérapie de reperfusion. L’ischémie peut être réduite par une augmentation d’apport d’oxygène, une levée d’un éventuel spasme coronaire par des dérivés nitrés et une sédation des douleurs et de l’angoisse par des analgésiques narcotiques.

Afin d’éviter un danger de chute importante de tension artérielle, des dérivés nitrés ne seront pas donnés aux patients avec tension artérielle systolique inférieure à 100 mmHg ou sous traitement par Viagra Ò , pris endéans les 24 heures avant la douleur thoracique.

La mise en route de thrombolyse par voie intraveineuse doit être proposée si le diagnostic d’IDM est évident (segments ST contigus sus-décalés à l’ECG) et si la durée attendue du transport vers l’hôpital est supérieure à une heure.

Une dose de 150 à 300 mg per os ou en intraveineux d’aspirine doit être donnée pour toute suspicion d’ischémie coronaire. Toutes les médications (par exemple dérivés nitrés, aspirine, calmants, thrombolytique) ne peuvent être ordonnées que par un médecin sur place. En cas de choc cardiogénique, il est indiqué d’amener le patient dans un centre hospitalier avec possibilité d’intervention coronaire 24h/24h (PTCA ou CABG)

Que faire avec des patients non suspects d’IDM (« patient à faible risque ») ?

Les patients avec probabilité faible d’IDM peuvent être emmenés par une ambulance conventionnelle vers l’hôpital. Le médecin de famille peut aussi décider en fonction du type de plaintes et des circonstances cliniques, que le patient soit suivi plus tard en ambulatoire et donc, qu’il ne doive pas se rendre à l’hôpital.

PHASE HOSPITALIERE PRECOCE (cliquez ici pour l'arbre décisionnel )

Règles générales

A l’admission, tout patient avec douleur thoracique doit être surveillé aussi vite que possible (endéans les 3 minutes) par un monitoring ECG avec défibrillateur. Ensuite, il faut penser à mettre une perfusion intraveineuse et affiner le diagnostic avec un ECG 12-dérivations et un prélèvement d’enzymes cardiaques (CK-MB et/ou troponine), à refaire après 6 heures. Une évaluation cardiaque doit être faite endéans les 20 minutes afin de pouvoir trier les patients en trois groupes

  1. patients avec IDM évident (segments ST sus-décalés)
      

  2. patients avec un syndrome coronaire aigu sans persistance de segments ST sus-décalés
      

  3. patients sans diagnostic clairement défini chez lesquels le type de plaintes
    peut être d’origine cardiaque ou non-cardiaque.

La conduite à tenir pour ces trois groupes est totalement différente et est détaillée dans les paragraphes suivants.

En regard de cette répartition, il faut également penser aux complications possibles telles les bradyarythmies, les tachyarythmies, l’arrêt cardiaque, le choc cardiogénique pour lesquels une prise en charge spécifique s’impose (suivant les directives standards).

IDM avec persistance de segments ST sus-décalé

L’aspirine, les dérivés nitrés et des calmants peuvent être prescrits comme mentionné plus haut dans la phase pré-hospitalière. D’autre part, des b -bloquants peuvent être infusés par voie intraveineuse pour réduire la demande myocardique en oxygène, sauf si le patient présente des signes de décompensation cardiaque ou une bradycardie.

La mise en route rapide d’une stratégie de reperfusion est la pierre angulaire du traitement de l’IDM. En fonction des possibilités logistiques des hôpitaux où sont admis les patients, il existe deux options possibles : la reperfusion médicamenteuse par thrombolyse ou mécanique par PTCA primaire.

Si le traitement thrombolytique est choisi, son infusion doit se faire endéans les 30 minutes de l’admission (door-to-drug time < 30’). Un schéma d’héparinothérapie est proposé en fonction du type de thrombolytique délivré.

Si l’option PTCA primaire est préférée, le traitement doit être réalisé rapidement (door-to-balloon : 90+/- 30 minutes). Ceci nécessite que l’équipe interventionnelle et la salle de coronarographie soient opérationnels dans l’heure qui suit l’admission du patient.

Bien que la stratégie de reperfusion dépende, pour de la plupart des patients, des possibilités de l’hôpital, il existe deux situations où les patients doivent pouvoir bénéficier d’office d’une recanalisation mécanique par PTCA :

  1. patients avec contre-indication pour une thrombolyse
      

  2. patients en choc cardiogénique. En fonction du délai de transport vers un centre « interventionnel », un traitement thrombolytique peut déjà être infusé chez ces patients en choc cardiogénique ; une PTCA de sauvetage pourra éventuellement être réalisée par la suite.

Après mise en route du schéma de reperfusion, le patient doit être suivi dans une unité de surveillance cardiaque. Tout patient en choc cardiogénique ou nécessitant une assistance cardiaque ou respiratoire doit être admis dans un service spécialisé de soins intensifs cardiaques.

Syndrome coronaire aigu sans persistance de segments ST sus-décalés 

Ce groupe représente les patients avec angor instable et IDM incomplet ou sous-endocardique.

La conduite à tenir est d’abord de proposer un traitement anti-thrombotique et anti-ischémique adéquat. Outre l’aspirine, l’héparine IV est infusée. A ce stade, de l’héparine non-fractionnée, comme l’héparine de bas poids moléculaire (HBPM) peut être injectée par voie sous-cutanée; en pratique, ce traitement peut être rapidement débuté grâce à sa facilité d’utilisation et son degré de stabilité hémostatique; en effet, aucun contrôle sanguin n’est nécessaire.

Le traitement par dérivés nitrés se fait par voie sublinguale au début, puis par voie intraveineuse.

Des b -bloquants peuvent être prescrits à la phase aiguë de l’IDM (IV ou per os), excepté en cas de contre-indications habituelles (par exemple : bradycardie, décompensation cardiaque, asthme).

La surveillance et la stabilisation de l’état se fera dans une unité de soins cardiaques. Ensuite, une stratification du risque cardiaque peut être faite à l’aide de la clinique, de l’ECG et du taux de troponine. Les patients à risque thrombotique élevé (ischémie récidivante et/ou persistante, taux de troponine élevés) sont considérés critiques ; ils doivent pouvoir recevoir un traitement par antagonistes de la glycoprotéine GP IIb/IIIa et subir une stratégie invasive par la suite.

Patients avec douleur thoracique sans origine évidente

Après avoir exclu un IDM ou un angor instable, il existe encore un grand groupe de patients avec douleur thoracique non définie.

Un bilan cardiaque ultérieur, comprenant des prélèvements sériés d’enzymes, un ECG avec monitoring du segment ST, une échocardiographie et une épreuve d’effort par cyclo-ergomètre, est réalisé pour un diagnostic de certitude. Si les plaintes font plutôt penser à une pathologie pulmonaire (embolie pulmonaire, pneumothorax, pleurite), vasculaire (dissection aortique) ou gastro-duodénale, il est nécessaire de proposer des examens spécifiques complémentaires ultérieurs.

CONCLUSION

La douleur thoracique aiguë est le symptôme de différentes pathologies avec pronostic différent. Le patient avec IDM court surtout un risque élevé de mort subite ; cette évolution fatale peut être contrecarrée par une prise en charge adéquate et rapide. La persistante d’une mortalité pré-hospitalière élevée de l’IDM et la relative « pauvreté » des moyens et personnels disponibles nous ont fait proposer des lignes de conduite pratiques maniables pour tout patient avec une douleur thoracique, depuis le domicile jusqu’à l’hôpital.

Les arbres décisionnels proposés sont consciemment concis et mis sous forme de schémas afin d’être plus abordable et utilisable pour toutes les parties concernées (patient, ambulancier, infirmière, médecin). Nous espérons que les premiers soins disponibles deviennent encore plus efficaces à l’avenir grâce à cette proposition de conduite aisée et uniforme.

REFERENCES

WHO-MONICA project 1985-1990: population versus clinical view of case fatality from acute coronary heart disease. Circulation 1997;96:3849-3859.

Calle P. Richtlijnen voor de behandeling van acuut myocardinfarct in de prehospitaalfase. Tijdschrift voor cardiologie 2000, 12, 83-101.

The Pre-hospital management of acute heart attacks. Recommendations of a task force of the European Society of Cardiology and the European resuscitation Council. Eur Heart J 1998;19:1140-43-63.

Management of acute coronary syndromes: acute coronary syndromes without persistent ST segment elevation. Recommendations of the Task Force of the European Society of Cardiology. Eur Heart J 2000; 21, 1406-1432

ACC/AHA guidelines for the management of patients with unstable angina and non-ST-segment elevation myocardial infarction. A report of the American College of Cardiology and American Heart Association Task for on Practice guidelines. Circulation 2000;102 (10): 1193-209

1999 update: ACC/AHA guidelines for the management of patients with acute myocardial infarction: executive Summery and recommendations. A report of the American College of Cardiology and American Heart Association Task for on Practice guidelines. Circulation 1999; 100: 1016-1030

International 2000 guidelines for Cardiopulmonary Resuscitation and Emergency Cardiovascular Care: International consensus on science. Part 7: Acute coronary syndromes. Circulation 2000; 102:I-1-370

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